Tout savoir sur le sommeil du coureur (Part 1)
Le sommeil est primordial dans la vie du coureur. Mais il est parfois difficile d'en connaitre réellement les effets et les enjeux. Pourquoi dormons-nous? Quelles sont les différentes phases de sommeil et leurs utilités, combien de temps doit-on vraiment dormir quand on est un sportif et quelles sont les erreurs à éviter pour ne pas nuire à la qualité de son sommeil? Zoom sur le sommeil du coureur...
Le sommeil du coureur: un incontournable?
Il faut bien avoir conscience que le sommeil est un état dans lequel nous passons environ 1/3 de notre vie. Il fait partie des fonctions vitales de l’organisme comme la respiration, la digestion ou encore notre immunité.
On dit souvent que la bonne santé repose sur 3 piliers : notre hygiène alimentaire, l'exercice physique et le sommeil. Cette affirmation est en partie fausse. En effet, beaucoup de spécialistes ( et on peut citer notamment Matthew Walker, un scientifique anglais spécialisé en neurosciences) pensent que le sommeil est bien plus qu’un pilier, c’est un fondateur sur lequel reposent les deux autres. Il garantit non seulement le bon fonctionnement de nos organes vitaux, mais il est aussi indispensable au maintien de nos fonctions d’apprentissage, de mémorisation et d’adaptation à notre environnement. Sans sommeil on ne pourrait tout simplement pas vivre.
Mais les études montrent que depuis un quart de siècle, la qualité du sommeil des Français se dégrade sérieusement. Une étude réalisée en 2021 par l’IFOP révèle que 67% des Français ont déclaré avoir eu des problèmes de sommeil durant les 8 derniers jours.
Les femmes sont plus affectées que les hommes, 71% d’entre elles en faisant état contre 60% des hommes. En 1995, 51% des femmes et 36% des hommes disaient souffrir de troubles du sommeil. En à peine 25 ans la situation s'est donc particulièrement dégradée.
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Ce phénomène n'est pas dû au hasard. Il correspond à la digitalisation de nos sociétés. Aujourd’hui tout va de plus en plus vite, nos société sont de plus en plus compétitrice à la recherche de la productivité et cela génère chez nous du stress et de la pression. Cette période correspond aussi à l'apparition des écrans notamment au lit. Qu’il s’agisse de smartphones, tablettes ou télévisions, les écrans jouent un rôle non négligeable dans la dégradation de la qualité de notre sommeil.
Pourquoi dort-on?
Schématiquement, le sommeil répare l’énergie que nous utilisons lors de notre éveil.
Il nous permet notamment de :
Restaurer nos stocks d'énergie
Renforcer notre système immunitaire
Consolider notre mémoire et nos acquis
Mettre au repos le système cardio vasculaire
On estime aussi que le sommeil permet d’épargner environ 15% de notre consommation d’énergie d’une journée par rapport à une personne assise et non endormie.
Et ce n’est pas tout, les études ont révélé que le sommeil nous permet aussi de prolonger notre durée de vie, notre mémoire et notre créativité. Il permettrait aussi de nous rendre plus lumineux, d’éviter la prise de masse grasse et le grignotage. Il nous aide aussi à lutter contre le cancer, la démence et les maladies saisonnières. Et en plus de tout ça, il diminuerait les risques de faire une crise cardiaque ou un accident vasculaire cérébral.
Pour toutes ses raisons, le sommeil est essentiel d’ailleurs toutes les espèces dorment y compris les insectes ou les poissons !
Comment fonctionne le sommeil?
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, être simplement allongé au repos est déjà très bénéfique pour notre corps. En effet, l’immobilité peut nous permettre de récupérer de la fatigue physique. C’est pour ça que même si on arrive pas à trouver le sommeil (la veille d’un marathon par exemple) être simplement au lit couché constitue déjà une forme de sommeil (à condition bien sûr de ne pas être sur son téléphone).
Il faut bien comprendre que le sommeil n’est sans doute pas nécessaire à toutes les formes de récupération même si il l’est pour la récupération cérébrale notamment.
Concernant le fonctionnement des cycles de sommeil, pendant que nous dormons, le cerveau suit un schéma bien distinct. Pendant certaines phases, les yeux sont en mouvement. Ils se déplacent d’un côté à l’autre furtivement. Les ondes cérébrales sont alors actives, presque comme à l’état d’éveil. Puis, durant d’autres phases, les yeux se calment et s’immobilisent..
Concrètement, il existe deux types de sommeil : le sommeil lent et le sommeil paradoxal.
Le sommeil lent se traduit en deux étapes "lent-léger" et ‘lent-profond’
– le sommeil lent-léger correspond aux stades dit “N1” et “N2”. L’activité du cerveau se ralentit peu à peu . A l’endormissement, c'est-à-dire en stade N1, le dormeur est réveillé par le moindre bruit, il ne se perçoit pas alors comme ayant dormi ou vaguement somnolant…
– le sommeil lent profond correspond au stade N3. Le ralentissement de l’activité cérébrale s'amplifie. Plus l’activité cérébrale est ralentie, plus le dormeur descend dans un état d’où il est difficile de le réveiller. Son cerveau est de plus en plus insensible aux stimulations extérieures, comme de son propre corps. En sommeil profond, il sera difficile à réveiller. En sommeil lent, on observe un ralentissement progressif des fonctions neurovégétatives avec l’approfondissement du sommeil et le ralentissement de l’activité cérébrale.
Le sommeil paradoxal est l’état dans lequel le dormeur est difficileà réveiller.
Son tonus musculaire est aboli, alors que son cerveau est aussi actif qu’en stade N1. On reconnaît le sommeil paradoxal également à la présence de salves de mouvements des yeux, appelés mouvements oculaires rapides.
Les anglo-saxons appellent d’ailleurs le sommeil paradoxal sommeil à mouvements oculaires rapides (REM ou Rapid Eye Movement sleep).
En sommeil paradoxal, le tonus des muscles disparaît complètement. On observe cependant de très brèves contractions, voire de petits mouvements des extrémités.
L’homme présente des érections péniennes et la femme des érections clitoridiennes avec un afflux de sang au niveau vaginal.
La raison est simple : notre système nerveux parasympathique prend le dessus sur le système nerveux sympathique. Ceci stoppe la libération de la noradrénaline et permet la libération de la testostérone. Ce changement d'équilibre entraîne la réponse nerveuse parasympathique de manière spontanée qui entraîne l'érection.
Au niveau des fonctions neurovégétatives, tout se passe comme si la régulation homéostatique, chargée de maintenir la stabilité des grandes fonctions de l’organisme, fonctionnait mal. On observe donc une grande instabilité du pouls, de la pression artérielle et de la respiration.
En résumé, lorsque tu t'endors, tu traverses un état de sommeil léger, intermédiaire entre l’éveil et le sommeil pendant quelques minutes : le stade N1, puis ton sommeil s’approfondit en stade N2. Tu es alors réellement endormi.
Puis après quelques dizaines de minutes de stade N2 le sommeil s’approfondit encore : c’est le sommeil lent profond. Tu es alors profondément endormi. Puis le sommeil profond s’interrompt, le sommeil léger réapparaît avant de faire place au premier épisode de sommeil paradoxal qui survient après 1h30 de sommeil environ. Ce premier épisode ne dure que quelques minutes.
le Sommeil lent léger puis sommeil lent profond puis sommeil paradoxal, tu as accompli ton premier cycle de sommeil qui dure environ 90 minutes.
Il faut bien comprendre que ta nuit de sommeil sera composée d’une succession de 3 à 5 cycles et qu’il est important d’aller au bout de chaque cycle pour bien récupérer.
A noter qu’au fur et à mesure que la nuit avance la composition des cycles va évoluer : le sommeil lent profond est très abondant en début de nuit et quand la nuit avance, il se fait plus rare et disparaît complètement au petit matin.
A l’inverse, le sommeil paradoxal qui est bref en début de nuit va occuper une place croissante dans chaque cycle de sommeil au fil de la nuit.
Mais combien de temps dois-je dormir en tant que coureur ?
Pendant le cycle de sommeil, notre cerveau suit jusqu’à 5 phases presque identiques de 90 minutes. Ce qui veut dire que nous avons besoin de 7 h 30 de sommeil, que nous arrondissons à 8 h pour être sûrs que le sommeil soit complet.
Mais il s’agit d’une notion aussi individuelle que la quantité de nourriture dont chacun a besoin. Même si la durée moyenne de sommeil d’un adulte est de 8h00, certains petits dormeurs se contentent de 6h de sommeil et ils se portent très bien alors que les “gros dormeurs” ont besoin de 9 à 10 heures de sommeil pour se sentir reposés. Ces différences sont liées à des aspects génétiques notamment. Il est donc impossible d’édicter une norme, chacun doit déterminer ses besoins de sommeil en fonction de ses propres réactions à l’allongement ou à la réduction de son temps de sommeil.
La durée idéale d’une nuit est celle qui te permet de te sentir reposé et d’avoir suffisamment d’énergie pour encaisser ta journée et tes entraînements sans te sentir épuisé le soir. Mais le souci, c’est que la plupart du temps nous ignorons quand nous manquons de sommeil. On a aujourd'hui tendance à s'habituer à notre état de fatigue. Mais en réalité, nos réflexes et notre concentration sont bien loins de notre réel potentiel.
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Heureusement, il y a des signes qui peuvent vous alerter et que vous devez être en mesure d'interpréter:
Baisse de la perception sensorielle ;
Limitation du champ visuel latéral durant votre journée
Ralentissement du temps de réaction motrice ;
Difficulté de concentration et manque d'attention ;
Troubles de l'humeur, irritabilité ;
Va maintenant se poser la très pertinente question de la durée de sommeil pour un athlète. Il n'existe actuellement pas de véritable consensus à ce sujet.
Cependant, on peut citer une étude de 2012 qui a comparé, les habitudes de sommeil de 47 athlètes olympiques et celles d'un groupe témoin composé de personnes du même âge et du même sexe mais ne pratiquant aucun sport. Le groupe des athlètes a passé un total de 8:36 min au lit, VS 8:07 pour le groupe témoin. Bref, on peut pas dire que la différence soit très significative…
Finalement, plus que la durée, c'est la qualité du sommeil du coureur qui doit primer. C'est-à-dire, une nuit calme, avec un bon matelas, des bons oreillers, pas d’écran et surtout (et c’est peut être le plus important) il doit respecter son rythme circadien. Avant de penser quantité l'athlète doit penser qualité
Le rythme circadien est en quelque sorte l'horloge interne du corps humain. Il s'agit d'un rythme biologique intégré prenant la forme d'un cycle d'environ 24 heures et régissant certains processus physiologiques comme le sommeil et l'alimentation.
Le rythme circadien est défini par une hormone du nom de « mélatonine ». Quand celle-ci augmente, notre envie de dormir augmente. La mélatonine est soumise à certains éléments extérieurs dont le soleil, l’âge ou encore l’ADN.
Le rythme de chaque personne est ainsi différent. C’est pourquoi nous parlons de personnes « couche-tôt » ou « couche-tard ». Donc, chez certains coureurs, le pic de mélatonine intervient tôt au soir puis diminue tôt à l’aube. (On estime que les « couche-tôt » représentent 40% de la population). En ce qui concerne les « couche-tard » (qui représentent 30% des personnes), et bien eux ils aiment se coucher tard et se lever tard. Les 30 derniers pour cent sont entre les deux.
Mais attention, il faut bien comprendre que la mélatonine n’a aucune influence sur le sommeil, elle ne fait que le lancer. En d’autres termes, la mélatonine ne participe pas au sommeil même, elle le déclare simplement.
Quelques recommandations pour ne pas nuire à la qualité de son sommeil
L'alimentation avant le coucher joue un rôle important. Il faut manger léger, pas trop gras, éviter l'alcool, qui fait monter la température du corps.
Baisser la température de la pièce à 18 degrés
Faire baisser son rythme cardiaque
Eviter les écrans et leur lumière bleue pendant deux heures avant le coucher
Se coucher à des heures fixes (même le week-end),
Pour trouver le sommeil vous pouvez utiliser la méditation, la lecture, l’ASMR
Enfin, le sportif doit essayer au maximum se mettre à l'heure avec son horloge biologique interne.
Malgré des avancées notables en matière de sport féminin, de nombreux aspects biologiques, comme le cycle menstruel, restent souvent sous-estimés dans l’élaboration des programmes d’entraînement. Pourtant, mieux comprendre son cycle menstruel et ses effets sur le corps peut devenir une force pour les sportives, en optimisant les entraînements, la récupération et les performances. Juliana Antero, chercheuse à l'INSEP, nous explique les effets du cycle hormonal sur les athlètes.